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  • Photo du rédacteurCatherine Conconne

Hiérarchiser les souffrances est une offense faite à l’humanité



Dans la dernière émission « On n’est pas couchés », sur France 2, qui accueillait l’écrivain Franz-Olivier Giesbert ainsi que Ginette Kolinka, rescapée d’Auschwitz, la chroniqueuse Christine Angot a fait un plaidoyer pour défendre l’idée que tous les crimes contre l’humanité ne se valaient pas.  Elle a notamment comparé la Shoah et l’esclavage en indiquant que« le but avec les juifs pendant la guerre, ça a bien été de les exterminer, de les tuer, et ça introduit une différence fondamentale, alors qu’on veut confondre avec, par exemple, l’esclavage des noirs envoyés aux États-Unis ou ailleurs, et où c’était exactement le contraire. C’est-à-dire l’idée c’était qu’ils soient en pleine forme, en bonne santé pour pouvoir les vendre et pour qu’ils soient commercialisables. Donc non, ce n’est pas vrai que les traumatismes sont les mêmes, que les souffrances infligées aux peuples sont les mêmes ».  En tenant ces propos, la chroniqueuse fait une erreur historique majeure en passant sous silence les millions d’hommes et de femmes transportés de force en fond de cale, les milliers de cadavres jetés par-dessus bord, les coups, les tortures, les viols… les conditions de travail insupportables qui réduisaient l’espérance de vie des esclaves sur les plantations à moins d’une quarantaine d’années. Elle omet de dire que, comme les juifs, l’humanité des noirs a été niée, les reléguant, pendant plusieurs siècles, à une condition de meuble que l’on pouvait vendre, exploiter ou tuer.  En tenant ces propos, Christine Angot insulte tous les descendants d’esclaves et, au-delà, tous ceux qui combattent la vaine hiérarchie des mémoires. Elle minimise des faits qui ont pourtant été reconnus par la loi comme étant un crime contre l’humanité. Elle contribue à nourrir une rengaine révisionniste qui grossit.  Nous nous étonnons de voir que ces affirmations n’aient suscité aucune réaction sur le plateau de l’émission. Nous nous étonnons que le présentateur, Laurent Ruquier, soutienne sa chroniqueuse. Nous nous étonnons davantage encore qu’aucune voix officielle ne se soit indignée. Nous nous étonnons, enfin, que cette chroniqueuse puisse continuer à être rémunérée par une chaîne de télévision publique. Nous avons saisi le CSA pour qu’il puisse prendre des mesures adaptées.  Nous voulons rappeler que chaque crime qui nie l’humanité d’un groupe d’êtres humains est un crime fait à l’humanité toute entière. Comme disait Aimé Césaire dans son cahier d’un retour au pays natal : Comme il y a des hommes-hyènes et des hommes- panthères, je serais un homme-juif un homme-cafre un homme-hindou-de-Calcutta un homme-de-Harlem-qui-ne-vote-pas l'homme-famine, l'homme-insulte, l'homme-torture on pouvait à n'importe quel moment le saisir le rouer de coups, le tuer - parfaitement le tuer - sans avoir de compte à rendre à personne sans avoir d'excuses à présenter à personne un homme-juif un homme-pogrom un chiot un mendigot Tenter de hiérarchiser les souffrances est une offense faite à l’humanité. Une offense inutile qui ne peut avoir de débouchés raisonnables. Nous condamnons très fermement ces propos. 


Catherine Conconne et Maurice Antiste Sénateurs de Martinique


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